L’image en noir et blanc de Sergio Larrain fige deux fillettes de dos dans une cage d’escalier à claire-voie. Les deux petites filles se suivent et se ressemblent et on se plaît à les imaginer sœurs ou amies d’enfance. Avec le recul, le moment suspendu semble illustrer avant l’heure la distanciation sociale imposée par la conjoncture actuelle.
Figure emblématique de la photographie sud-américaine, le chilien Sergio Larrain (1931-2012) photographie les enfants des rues et les laissés-pour-compte de Santiago et sillonne le monde au gré de ses reportages avant de resserrer définitivement sa focale sur son pays natal et sur la ville portuaire de Valparaíso. Instinct et acuité visuelle le guident dans ses vagabondages. Il saisit le ballet fugitif des passants et le chassé-croisé de l’ombre et de la lumière. Photographe humaniste, sa démarche est à la fois sociale et poétique. “Une bonne photo naît dans un état de grâce. Cela arrive lorsque l’on est libéré des conventions, des obligations, de la compétition: libre comme un enfant découvrant la réalité pour la première fois. Le but du jeu, ensuite, est d’organiser le cadre.”
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